La
première légion d’honneur vieillevignoise.
La légion d’honneur fut créée sous le Consulat par
Napoléon BONAPARTE le 26 floréal An X (19 mai 1802). Le Premier Consul
souhaitait la création d’un ordre national « qui
soit le signe de la vertu, de l’honneur, de l’héroïsme, une distinction
qui serve à la fois à la bravoure militaire et au mérite civil ». Le
14 juillet 1804 eut lieu la première remise.
Le premier vieillevignois à obtenir le titre de
chevalier de la légion d’honneur s’appelle Auguste BAUDRY. Il naît dans le
bourg de la commune le 8 mars 1788, fils du docteur en médecine Charles René
Augustin BAUDRY et de Jeanne Marie THOMAS de la Coursaudière. Toute la
bourgeoisie locale est présente à son baptême comme en témoignent les
signatures de GOBIL, des GUERAUD ,des notaires DELAVAUGUYON et THOMAS. Son
père, ancien chirurgien vieillevignois, vient d’obtenir son diplôme de docteur
en médecine et s’est installé récemment à Machecoul pour y exercer son art.
Sitôt la naissance d’Auguste, la famille déménage pour Machecoul où son
demi-frère Stanislas BAUDRY est déjà collégien.
Mais la Révolution vient bousculer l’installation de
cette famille dont le père s’affiche comme républicain. L’insurrection
contre-révolutionnaire des « paydrets » le 10 mars 1793 précipite
Charles René Augustin BAUDRY dans les geôles de la ville sous les ordres de
SOUCHU. Machecoul libérée par les républicains, le docteur BAUDRY se réfugie à
Nantes où Auguste va passer sa jeunesse.
A l’instar de son père qui va servir comme officier de
santé dans l’armée de l’Ouest et de ses frères Stanislas, Prosper et Théophile
qui vont s’engager dans les armées soit républicaines soit impériales, Auguste entre
au 88ème régiment de ligne le 11 janvier 1807, en qualité d’enrôlé
volontaire. Il prend part aux campagnes de 1808 à 1813 en Espagne où il est
blessé à plusieurs reprises et fait prisonnier de guerre à la Redoute des Signaux
le 10 novembre 1813.
Libéré, il rentre en France le 9 juin 1814 et prend part
à la campagne de Belgique de 1815. Grâce à ses états de service, il est nommé
chevalier de la légion d’honneur le 2 novembre 1814 en qualité de sergent major
des grenadiers du 88ème régiment d’infanterie. Il devient ainsi le
premier vieillevignois de naissance à obtenir la distinction suprême.
On perd alors toute trace de ce héros local. Puis il
réapparaît dans la cité nantaise en 1851. Il arrive tout droit de Géorgie
(Etats-Unis) pour régler la succession de sa sœur Henriette et de son frère
Théophile dont il est pour parti héritier. Logé chez la fille de son demi-frère
Stanislas BAUDRY, il profite de sa présence en France pour revendiquer son
titre de chevalier de la légion d’honneur. Il devra prouver par acte de
notoriété qu’il est bien le Auguste BAUDRY honoré le 2 novembre 1814. A cette
époque de nombreux états-uniens usurpaient l’identité de français pour obtenir
la fameuse reconnaissance nationale.
Auguste obtient ainsi la confirmation de son titre acquis
et la médaille de Sainte-Hélène attribuée par Napoléon III à tous les
survivants des armées de la République et de l’Empire. En décembre 1851, il
repart en Amérique avec ses précieuses médailles. Mais d’où venait-il exactement
?
La Restauration de 1815 étant peu propice aux
serviteurs de l’Empire, Auguste après un court passage chez son père devenu
médecin à Herbignac, s’embarque pour les Etats-Unis. Il accoste probablement
via les Caraïbes dans le port de Savannah en Géorgie. Puis il gagne rapidement la
ville d’Augusta située dans le même Etat où il se marie en 1818 à Sophie Adèle
TARDY qui donnera naissances à deux filles. Veuf, Auguste épouse Elisabeth
OLIVER avec laquelle il n’aura pas d’enfant.
Devenu médecin, il va exercer comme
« physician » à Augusta City jusqu’à sa mort le 18 août 1865. Il possédera
jusqu’à seize esclaves noirs dans cette contrée sudiste. Auguste décède
quelques mois après la fin de la Guerre de Sécession à laquelle vu son âge de
77 ans, il n’a pas pu participer directement. Dans quel camp se
situait-il ? Avait-il gardé ses idées républicaines et rejoint les
anti-esclavagistes ?
N’ayant pas eu de fils, son nom aurait pu disparaître,
mais son petit-fils Augustus BAUDRY MOORE devint un juge célèbre de Savannah et
fut le trésorier de l’Evéché. Grâce sans doute à la notoriété du grand-père et
de ce juge, plusieurs générations vont garder la mémoire des BAUDRY en portant
le nom de BAUDRY MOORE. De nos jours, des descendants de notre vieillevignois
portent encore ce patronyme à Savannah et Augusta et l’un d’entre eux garde
certainement dans un tiroir ou accrochées à un mur les décorations de leur
ancêtre.
On sait que Marion BAUDRY MOORE en était la
propriétaire en 1948 puisqu’elle sollicita la Grande Chancellerie pour obtenir
un certificat d’authenticité. Il reste maintenant à prendre contact avec cette
descendance pour mieux connaître l’histoire américaine de ce compatriote qui
fut le premier de sa commune à recevoir les honneurs de la France moderne.
Dominique TETAUD
Association Généalogique des Marches Vieillevignoises.