La difficile
introduction du vaccin antivariolique à Vieillevigne, Bulletin Municipal de
Vieillevigne, Novembre 2009, Docteur Dominique Tétaud.
La difficile introduction
du vaccin antivariolique à Vieillevigne.
Stanislas-Marie DELAVAUGUYON, le dernier fils du notaire
vieillevignois Luc-Antoine-Valentin DELAVAUGUYON,
comme son grand-père embrasse la carrière de chirurgien. Né à Vieillevigne le 25
septembre 1795, après des études médicales à Nantes, il devient officier de santé vers 1821, dans sa commune natale. Plus jeune et sans doute plus au
fait des nouveautés médicales que l’autre chirurgien vieillevignois René-Marie HARDOUIN, on va le
charger de réaliser dans la commune les vaccinations contre la variole.
L’équivalent de notre DASS
actuelle, lui demande en 1822 d’établir un état nominatif des enfants vaccinés en 1821. Stanislas
dresse un tableau qui regroupe sept enfants tous âgés de moins de deux ans, cinq sont
vieillevignois, les deux autres sont de Mormaison. En regard du nombre de
naissances à Vieillevigne qui était de
177 en 1821, cela fait bien peu d’adhésion à cette prévention. C’est pourquoi, Stanislas écrit cette
requête au maire de Vieillevigne Le MAIGNAN de l’Ecorce le 16 avril 1822 :
« Monsieur le Maire,
J’ai l’honneur de vous
adressez l’état nominatif des enfants que j’ai vacciné dans l’année 1822. Le nombre en est
bien peu considérable sans doute, mais cela ne provient que de la difficulté de faire savoir les jours
fixés pour cette légère opération, seul préservatif cependant d’un fléau destructeur. Si,
monsieur le Maire, vous invitiez vous-même M.M. les ecclésiastiques de cette commune, a en faire la
publication au prône de la messe paroissiale, il me semble que ce serait le
seul moyen de propager la
vaccine, et de voir peu à peu s’anéantir la petite vérole.
J’ai l’honneur d’être
avec votre respect, Monsieur le Maire, Votre très humble et
très obéissant serviteur
DELAVAUGUYON chirurgien.
»
Les moyens de communication sont réduits à cette époque
de la Restauration, et seul le prône de la messe dominicale
permet d’informer les nombreux habitants des villages. De plus, le petit clergé est réticent aux nouveautés
que le dynamisme post-révolutionnaire à susciter. On considère les épidémies comme « des
châtiments mérités par les pêcheurs ». L’évêque de Nantes sur la demande du Préfet, adresse à ses curés
le 25 juillet 1825 une circulaire destinée à être lue en chaire afin d’annoncer le passage du vaccinateur ;
mais les desservants passent souvent outre.
Stanislas quitte Vieillevigne d’abord pour les Sorinières
puis Nantes et s’installe définitivement vers 1830 à
la Haie-Fouassière où il exerce l’art de chirurgie et la fonction de maire. Il meurt en 1869, un an avant
le désastre de Sedan où Napoléon III et l’armée française subissent une cuisante défaite signant la
fin du Second Empire. S’ajoute à la déroute une épidémie de variole dans les rangs français. La
mortalité y sera dix fois plus élevée que dans l’armée prussienne qui avait
pris la précaution depuis quelques
années de vacciner ses soldats. Les militaires issus de l’Ouest de la France qui avait récusé la
vaccination sont les plus atteints par la variole hémorragique.
La Troisième République en tire lentement les
conséquences et se décide en 1883 à vacciner de façon obligatoire les
militaires puis les enfants de l’école publique. La généralisation viendra plus
tard. Le 29 octobre 1979 grâce à
la vaccination systématique, l’OMS déclare la variole éradiquée de la surface de la terre, soit
près de deux siècles après la découverte de la vaccine le 14 mai 1796 par l’anglais Edward JENNER.
Le passé nous renvoie toujours à notre présent, en
l’occurrence à cette période de pandémie grippale qui sévit depuis
quelques mois. Si le manque de communication et d’informations était de mise au XIXe
siècle, c’est maintenant le déferlement médiatique d’informations et de désinformations qui nuit à
notre jugement. Etre ou ne pas être vacciné ? Etre contaminé et être contaminant ? Etre vacciné
pour se protéger personnellement et ou protéger son entourage de la contamination ? Dilemme
entre prévention individuelle ou collective ? Beaucoup de questions que nous ne devons pas éluder
car nous avons tous l’obligation d’y répondre pour soi, et pour ceux que l’on côtoie. Stanislas-Marie DELAVAUGUYON serait sans doute heureux de savoir qu’il a participé modestement bien que sans
doute insuffisamment à son goût, à l’éradication de la variole.